HUMI-CARE : Rendre le système de soins de santé plus humain pour les personnes demandeuses d’asile et réfugiées par la formation interculturelle des médecins-résidents de médecine familiale : une recherche participative et multisite au Québec
Résumé
Au Canada, les personnes réfugiées et demandeuses d’asile – population composée de personnes majoritairement racisées – sont souvent exposés à des refus de soins et à de la discrimination dans les institutions du réseau de la santé et des services sociaux. Ces barrières, liées aux institutions et aux systèmes qui façonnent les iniquités de santé (déterminants structurels de la santé) ont des impacts sur l’accès et la qualité des soins. Ainsi, les personnes réfugiées et demandeuses d’asile reçoivent moins de soins, et plus tardivement, que la population générale. Parmi les déterminants structurels de la santé, une revue systématique canadienne souligne que la formation des professionnels de santé a une influence déterminante sur la discrimination dans les soins de santé. Le développement des compétences professionnelles en contexte interculturel par la formation abordant les enjeux vécus par les populations qu’ils servent est donc primordiale.
Au Québec, plusieurs établissements de santé sont mandatés pour offrir des soins aux personnes réfugiées et demandeuses d’asile. Nous nous penchons sur plusieurs sites, à Montréal, à Brossard et à Québec, couvrant les quatre facultés de médecine principales au Québec. Le premier est le GMF-U de Bordeaux-Cartierville, qui propose un modèle innovant de formation intégrée : il invite ses résidents de médecine de famille de l’Université de Montréal à s’initier aux compétences interculturelles dans les soins, et à prendre en charge une famille demandeuse d’asile pendant un an. Le deuxième cas est celui du GMF-U de Parc-Extension, qui offre une formation continue des résidents en médecine de famille de l’Université McGill pour mieux accueillir demandeurs d’asile et réfugiés. Le troisième cas est le GMF-U Charles-LeMoyne dont une partie de la formation des résidents de l’Université de Sherbrooke est reliée à la clinique des réfugiés de Brossard. Ces formations se concentrent sur des cours théoriques ainsi que des interactions entre patients et cliniciens. Pour agir sur les déterminants structurels des inégalités sociales en santé, il convient également de susciter la réflexivité des professionnels de santé, à la fois de manière individuelle et collective. Or, il existe encore très peu de travaux – aucun au Québec, à notre connaissance – sur ces approches réflexives.
Objectif du projet de recherche
Évaluer de façon comparative la mise en oeuvre et les effets des activités interculturelles dans le cadre de la formation des résidents en médecine de famille et tester une intervention pilote suscitant la réflexivité des résidents.
Nous proposons une approche de recherche comprenant deux volets :
- Cartographie des formations interculturelles sur la base des sites inclus dans cette recherche
- Volet interventionnel (en cours, 2025) : co-construction et déploiement d’une intervention pilote espaces réflexifs pour les résidents du GMF-U de Bordeaux-Cartierville (favorisant l’échange de pratiques en groupe, au sujet des défis rencontrés dans la prise en charge de familles demandeuses d’asile, et les stratégies en lien avec l’approche interculturelle des soins pour améliorer celles-ci). L’intervention pilote sera évaluée via une analyse développementale.
- Volet évaluatif des formations existantes, avec un protocole d’évaluation réaliste mobilisant des méthodes multiples, visant à recueillir :
- la compréhension des mécanismes de développement des compétences interculturelles des résidents (entrevues individuelles, n=30)
- le taux perçu d’autoefficacité des résidents à réaliser le suivi de la patientèle migrante (dont les demandeurs d’asile et migrants à statut précaire) (questionnaire d’évaluation, n=40)
- des focus groupes avec la patientèle migrante par rapport à leurs interactions avec les résidents en contexte de soins (n=30)
L’équipe de recherche, composée de médecins de famille chevronnés et de chercheurs en évaluation des services de santé et en santé des migrants à travers l’ensemble du Québec, entend ainsi combler le manque de connaissances sur la mise en œuvre et les effets de telles formations interculturelles pour les résidents et pour personnes réfugiées et demandeuses d’asile. En contribuant de manière distinctive à la littérature, cette recherche influencera directement les programmes de formation à l’échelle provinciale, avec un potentiel d’extension au Canada dans son ensemble.
Chercheur.se.s
2025-2026