Un chez-soi dans la communauté. Les besoins, les attentes et les préférences d’adultes autistes en matière d’hébergement et de logement au Québec.

Février 2023

Courcy, Isabelle et Nuria Jeanneret. (2023).
Université de Montréal, La Maison de l’Autisme. Montréal, Canada.


Un chez-soi dans la communauté

Les besoins, les attentes et les préférences d’adultes autistes en matière d’hébergement et de logement au Québec

À l’heure actuelle, force est de constater que l’offre résidentielle peine à répondre aux besoins des personnes autistes en matière d’hébergement et d’accès à un logement adapté. Le peu d’options offertes ne tient pas compte de la pluralité des besoins, pouvant aller d’un logement conventionnel insonorisé à un hébergement en résidence adaptée avec soutien quotidien. De plus, les attentes et les préférences des personnes autistes sont rarement prises en compte, de même que la diversité de leurs situations et de leurs projets de vie.

Une recherche inclusive, ancrée dans un partenariat recherche-communauté, a été réalisée afin de documenter les besoins, les attentes et les préférences des personnes autistes en matière d’hébergement ou de logement au Québec. Une consultation par questionnaire en ligne visant les personnes autistes de 16 ans ou plus a été effectuée d’octobre 2021 à mai 2022. L’échantillon volontaire (n = 370) comprend 179 adultes ayant répondu au questionnaire (avec ou sans soutien) et 191 personnes autistes pour qui un proche a répondu.

Résultats

De prime abord, 59 % ne vivent pas dans la situation d’hébergement ou de logement qu’elles souhaiteraient. Des personnes qui habitent avec leur famille, 76 % des participant·e·s autistes et 69 % de celles pour qui un proche a répondu n’aspireraient pas à cette situation à long terme. De plus, 9 personnes sur 10 rapportent un ou plusieurs obstacles dans l’accès à un logement ou à une ressource d’hébergement dans les deux dernières années :

  • 62 % un manque de logement ou de ressources d’hébergement adaptés à leurs besoins
  • 52 % des contraintes économiques
  • 34 % des difficultés dans la recherche d’un logement ou d’une ressource d’hébergement
  • 24 % un manque de proximité avec les services, la famille ou l’emploi.

Les aspects prioritaires dans le choix d’un logement ou d’une ressource d’hébergement sont la sécurité (93 %), le prix (91 %), la qualité de la communication avec les propriétaires (89 %), la propreté du logement (88 %) et l’insonorisation (85 %). Avoir une cuisine dans le logement et des services de transport à proximité sont également ressortis comme des critères de première importance pour les participant·e·s autistes. Pour les personnes pour qui un proche a répondu, le quartier, avoir une cafétéria ou des services alimentaires dans le bâtiment et l’accès à des activités communautaires ou de groupe importent davantage.

Les besoins de soutien et d’accompagnement à la vie autonome sont pluriels et peuvent grandement varier d’une personne à l’autre. Il peut s’agir des tâches administratives et de la planification du quotidien, de l’organisation de la vie de tous les jours, de l’accompagnement en emploi ou dans les études, de la santé mentale. Six personnes sur 10 feraient face à des obstacles dans l’accès aux services éducatifs et psychosociaux, qu’il s’agisse d’un manque de professionnel·le·s ou d’intervenant·e·s formé·e·s (63 %), d’un manque de services dans la région de résidence (48 %) ou des coûts liés aux services (40 %). Enfin, plus de la majorité des personnes ont manifesté un intérêt franc (49 %) ou une ouverture (21 %) à cohabiter dans un projet résidentiel en mixité sociale. Un espace partagé, calme et dans lequel pourraient se tenir des activités encadrées, à participation volontaire, serait apprécié. Lorsqu’envisagée, la cohabitation en mixité sociale est perçue comme un contexte pouvant être bénéfique pour les personnes autistes et les personnes non autistes.

Constats

J’aimerais quitter le nid familial dans les prochaines années, mais je m’aperçois qu’il n’y a aucun centre d’hébergement adapté aux personnes autistes à haut potentiel. (Jeune adulte) »

Ce serait formidable de rencontrer des gens de mon âge qui ne sont pas autistes, qui vivent tous ensemble et apprennent les uns des autres. (Jeune adulte)

Il vivra probablement avec ses parents aussi longtemps que nous le pourrons. C’est très stressant, difficile et épuisant.  (Proche d’un jeune adulte)

En choisissant d’aller vivre en chambre, mon fils a gagné en autonomie : alimentation, faire son ménage de chambre, laver son linge ou ses draps. (Proche d’un jeune adulte)

Isabelle Courcy

Professeure adjointe, Département de sociologie, Université de Montréal